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Le corridor Émirats arabes unis – Afrique : quand les réputations et les relations conditionnent la croissance

29 septembre 2025

Analyse

Dans l’énergie, les mines, la logistique et l’agro-industrie, les gagnants seront ceux qui sauront inspirer confiance, anticiper les risques et engager les parties prenantes des deux régions.
Le corridor commercial et d’investissement reliant les Émirats arabes unis et l’Afrique est devenu l’un des espaces économiques les plus dynamiques mais aussi les plus complexes au monde. Avec des échanges bilatéraux estimés à plus de 60 milliards USD par an, et des investissements émiratis présents dans les ports, l’énergie, la finance et l’agro-industrie sur tout le continent, ce corridor occupe une place centrale dans les stratégies de croissance des deux parties. Mais l’ambition s’accompagne de risques : instabilité politique dans certaines régions d’Afrique, opacité réglementaire, marchés fragmentés et forte compétitivité aux Émirats exigent une approche disciplinée et guidée par l’intelligence stratégique. C’est là que la communication stratégique et l’intelligence économique prennent tout leur sens. Bien utilisée, cette discipline dépasse le simple rôle de valorisation de l’image : elle offre aux entreprises, investisseurs et gouvernements la clarté nécessaire pour anticiper les évolutions politiques, protéger leur licence d’opérer et sécuriser des partenariats solides dans des marchés où les approches classiques ne suffisent pas  

About

Cédric Roux est Directeur Général de Concerto Middle East. Il conseille les organisations publiques et privées engagées dans le corridor commercial entre le Golfe et l’Afrique, en pilotant des projets complexes en communication stratégique et intelligence économique. Son expertise couvre la finance, l’énergie, les mines, l’agro-industrie et les infrastructures. Pour toute demande d’information ou pour explorer comment Concerto peut accompagner vos objectifs, contactez-le sur cr@concerto-pr.com.
QUICK INSIGHTS  

Afrique : croissance et complexité

Les atouts démographiques et en ressources de l’Afrique – minerais abondants, terres arables, population de plus en plus urbanisée – attirent depuis longtemps les investisseurs du Golfe. Mais ce potentiel ne peut être compris sans reconnaître la volatilité qui l’accompagne. En Afrique de l’Ouest et au Sahel, les gouvernements réajustent leurs relations avec les investisseurs internationaux, parfois de manière abrupte. Les concessions minières sont renégociées, les contrats énergétiques réexaminés, et les transitions politiques peuvent rapidement modifier l’équation de risque pour les investisseurs. Pour les entreprises émiraties, gérer ces évolutions exige bien plus que des contrats juridiques. Il faut anticiper l’orientation des débats politiques, avoir accès à des relais locaux crédibles et aligner son implantation avec les agendas nationaux de développement. Dans plusieurs cas récents, des entreprises ont été confrontées à des résistances inattendues de la part des gouvernements. Celles qui avaient investi dans des relations gouvernementales proactives et des dispositifs de communication de crise ont été les mieux placées pour défendre leur réputation, protéger leurs capitaux et maintenir la continuité opérationnelle.  

Émirats : une plateforme aux attentes croissantes

Le corridor n’est pas à sens unique. De plus en plus, les gouvernements africains et les entreprises panafricaines considèrent les Émirats non seulement comme une source de capitaux, mais comme une plateforme globale. Abou Dhabi et Dubaï se sont imposés comme des hubs où dirigeants et entrepreneurs africains peuvent lever des fonds, valoriser leur récit et se connecter avec leurs homologues asiatiques et européens. Ici, le défi n’est pas l’instabilité mais la sélectivité. Le marché émirati est très compétitif, avec de nombreux acteurs internationaux cherchant à capter l’attention et le capital des Émirats. Les gouvernements et entreprises africains doivent donc adapter leur discours pour résonner auprès des décideurs émiratis. Le succès ne dépend que rarement de l’ampleur des opportunités ; il repose sur la capacité à aligner les projets avec les ambitions stratégiques des Émirats en matière d’énergie renouvelable, de corridors logistiques et de sécurité alimentaire.  

Engagement stratégique : les règles du jeu

Notre expérience des deux côtés du corridor met en évidence trois enseignements récurrents : 1. Les bonnes pratiques en affaires publiques sont déterminantes. En Afrique, où l’autorité de l’État est forte et la politique souvent personnalisée, établir des relations précoces et crédibles avec les ministères, les régulateurs et les leaders locaux est décisif. Aux Émirats, où la décision est centralisée et stratégique, l’accès exige précision, crédibilité et capacité à inscrire toute proposition dans la vision économique de long terme du pays. 2. L’engagement des parties prenantes doit être systémique. L’action ne peut s’arrêter au gouvernement. Les entreprises et gouvernements qui entrent sur de nouveaux marchés doivent bâtir des coalitions durables avec le secteur privé, les médias et la société civile. Cela est particulièrement vrai en Afrique, où l’adhésion locale peut déterminer si un projet rencontre des résistances ou prospère. 3. L’entrée sur un marché exige intelligence et maîtrise culturelle. Aucun marché africain ne ressemble à un autre : les structures réglementaires diffèrent, tout comme les attentes sociales. Une approche uniforme est vouée à l’échec. De même, au sein du CCG, les sensibilités culturelles influencent la manière dont les initiatives sont perçues. Une approche adaptée est essentielle pour inspirer confiance des deux côtés.  

Accompagner la transformation des deux côtés

Les projets les plus marquants que nous avons menés illustrent ces principes. Nous avons accompagné des gouvernements africains pour protéger leur réputation internationale et mobiliser des financements d’infrastructures essentielles, y compris en période de transition politique. Nous avons positionné des plateformes panafricaines de finance à forte croissance comme des acteurs crédibles dans plusieurs marchés, en engageant régulateurs, investisseurs et médias de manière à soutenir leur trajectoire. Et nous avons guidé des entreprises émiraties lors de leur entrée sur de nouveaux marchés africains, d’annonces stratégiques ou de crises : en développant des messages rassurant les gouvernements hôtes, en optimisant leur engagement médiatique et en préservant leur licence d’opérer.  

La route à venir

Le corridor Émirats–Afrique est appelé à croître rapidement dans des secteurs clés : transition énergétique, pétrole et gaz, mines, agro-industrie, logistique et infrastructures numériques. Mais la fragmentation, la montée de la compétition géopolitique et l’évolution des modes de gouvernance continueront de relever les barrières à l’entrée. Les gagnants ne seront pas ceux disposant des poches les plus profondes, mais ceux qui investiront dans l’intelligence, le récit et les relations. Chez Concerto, nous voyons notre rôle comme allant bien au-delà de celui d’un simple conseiller. Nous aidons les organisations à anticiper les risques politiques et réputationnels, à construire les bonnes coalitions et à raconter leur histoire de manière à résonner des deux côtés du corridor. Dans un espace où les enjeux sont élevés et les attentes grandissantes, notre mission est de garantir que nos clients ne se contentent pas d’entrer sur les marchés : mais qu’ils y durent, y influencent et y prospèrent.