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Élections nigérianes de 2023 : qui sont les candidats et quels sont les défis ?

29 novembre 2022

Analyse

Le 25 février 2023, le Nigeria organisera ses septièmes élections générales depuis le retour à la démocratie et au régime civil en 1999.
Parmi les 18 candidats en lice pour succéder au Président Buhari, trois d’entre eux sont favoris. Bola Tinubu, ancien gouverneur de Lagos et candidat du parti au pouvoir All Progressives Congress (APC), l’ancien vice-président (1999-2007) Atiku Abubakar, candidat du principal parti d’opposition, et Peter Obi, l’outsider du parti travailliste, donné gagnant dans plusieurs sondages publiés en septembre, notamment ceux de Premise Data Corp pour Bloomberg News et NOI Polls pour la fondation ANAP. Tous trois sont confrontés au défi de convaincre au-delà de leur électorat naturel dans un pays où la politique est fortement influencée par les appartenances religieuses et ethniques. À cela s’ajoute un contexte national détérioré dans lequel se dérouleront les élections de février, en particulier sur les plans économique, sécuritaire et socio-politique. Sur le plan économique, le Nigeria est confronté à une inflation persistante dépassant les 21 % en octobre et un taux de chômage parmi les plus élevés en Afrique, atteignant 42,5 % chez les jeunes. La production pétrolière, en baisse continue depuis les dix dernières années, et les problèmes d’accès à l’électricité, pèsent sur l’économie. Quel que soit le vainqueur, l’accès à une source d’énergie fiable sera l'une des priorités du nouveau président. Bien que des projets aient été récemment lancés, telle que la construction de la centrale hydroélectrique de Zungeru, d'une capacité de 1650 mégawatts et dont le coût est estimé à 3 milliards de dollars, l’enjeu est de taille : plus de 85 millions de Nigérians n'ont toujours pas accès au réseau électrique. Marquée par l’insurrection islamique dans le nord-est du pays, le banditisme dans le nord-ouest et le sud, ainsi que des velléités séparatistes dans le sud-est, la situation sécuritaire reste compliquée. Le gouvernement peine à gérer cette crise, qui influencera sans aucun doute les périodes électorale et post-électorale. Les attaques fréquentes menées par des bandes criminelles risquent de dissuader les électeurs et contribuer ainsi à une hausse de l’abstention dans les zones marquées par l’insécurité. Des actions ciblées contre des bureaux électoraux ont déjà été identifiées, en particulier dans le sud-ouest (Ogun et Osun). Leur fréquence devrait augmenter à l'approche des élections, avec comme cible principale les installations de la commission électorale nationale indépendante (CENI). Au-delà de ces questions, la capacité de la CENI à garantir des élections crédibles soulève de nombreuses interrogations. Sa capacité à mettre en œuvre certaines dispositions de la nouvelle loi électorale de 2022, particulièrement la régularisation de l’utilisation de dispositifs électroniques (ex., système d'accréditation des électeurs bimodal, BVAS) est au cœur des débats. Si, en théorie, la numérisation du processus électoral est censée réduire le risque de fraude, les Nigérians restent sceptiques quant à l'intégrité et à la crédibilité des résultats. Les électeurs doutent également de la capacité de la CENI à relever le défi logistique que représente le déploiement de près de 1,5 million d'employés dans les 176 846 bureaux de vote (56 872 de plus que lors de l'élection précédente). Tous ces facteurs sont susceptibles de réduire la mobilisation électorale le jour du scrutin et par conséquent la crédibilité des élections, malgré une augmentation significative du nombre d'électeurs inscrits. En 2019, le taux de participation n'avait pas dépassé 35 %.  Parmi les notes positives, le nombre préliminaire d'électeurs inscrits est de 93,5 millions, soit près de 10 millions de plus qu'en 2019, dont 84 % ont moins de 34 ans d’après la CENI. Ces chiffres sont révélateurs d’un plus grand engagement de la jeunesse, sous l’impulsion des mouvements #EndSARS (2020) et Not Too Young to Run qui ont marqué les Nigérians ces dernières années.

À propos

Carine Gazier est project consultant chez Concerto, elle est spécialisée sur les questions politico-économiques et le secteur de l'énergie en Afrique. Pour plus d'informations et d'analyses, ou pour mieux comprendre comment Concerto peut vous accompagner, veuillez contacter insights@concerto-pr.com.